Reconstruction Chevalement La Pouèze (49)

Reconstruction Chevalement La Pouèze (49)

Les dernières « Lettres de l’Anjou » abordaient  l’une,  le bois comme matériau de construction l’autre, l’exploitation de l’ardoise et son usage en couverture. Un ouvrage exceptionnel fait la synthèse de ces deux articles : le chevalement en bois de La Pouëze.

Les fendeurs d’ardoise devant leur tue-vent qui les protégeaient contre les intempéries avec en arrière-plan, le chevalement en bois de La Pouëze (CPA collection Odile Cardouat-Bedouet, commission du patrimoine, commune de La Pouëze)

L’Anjou, ce pays noir.

Les veines de schiste traversent l’Anjou en diagonale  du bassin d’Angers-Trélazé vers Segré et Pouancé. Les premières exploitations ardoisières qui remontent au Moyen-âge s’implantèrent tout naturellement sur les affleurements schisteux du Massif Armoricain, en une multitude de petites carrières à ciel ouvert que l’on appelle aussi des « perrières ». Elles appartenaient le plus souvent à des carriers indépendants.
Au XIXème siècle, le développement commercial de l’ardoise et l’évolution industrielle des techniques d’extraction signent le déclin des perrières peu rentables comme celles des Garennes à Juigné-sur-Loire ou de Belle-Poule aux Ponts-de-Cé. Parallèlement  s’opère un regroupement des exploitations ardoisières avec la constitution de deux grandes sociétés : la Commission des Ardoisières d’Angers en 1845 et la société des Ardoisières de l’Anjou en 1894.

La Pouëze, une cité minière.

La Pouëze, dont l’exploitation de l’ardoise sur le territoire communal remonte au XVème siècle, n’échappe pas à ce mouvement de concentration des perrières. En 1870, c’est la Commission des Ardoisières d’Angers qui possède la totalité des gisements : « Le Clos Colas », « La Limanderie » et surtout « L’Espérance » et «La Carterie ». Le plan du site ardoisier montre bien L’alignement des carrières à ciel ouvert de 60 à 80 mètres de profondeur disséminées sur l’affleurement de la principale veine de schiste.

Répartition des carrières à ciel ouvert sur le site minier de La Pouëze.

Sous l’impulsion de la Commission des Ardoisières d’Angers, l’exploitation de l’ardoise devient souterraine. Le premier puits de type « puits bouteille » sera foré vers 1870 mais cette méthode qui consistait à descendre toujours plus profondément par gradins successifs pour extraire la pierre présentait des risques d’effondrement de la voûte et un danger permanent pour les mineurs.

Schéma d’extraction de la pierre en descendant sous voûte. La hauteur sous voûte pouvait atteindre jusqu’à 100 m ce qui ne permettait pas de prévenir la chute de blocs de schiste (« A propos  des ardoisières d’Anjou… », J.P. Drevet, 1993)

La véritable révolution technologique viendra d’une nouvelle méthode d’extraction dite « en bancs remontants » ; l’ingénieur Blavier imagine en 1877 de forer un puits au plus profond des veines d’ardoise et d’extraite la pierre de bas en haut en abattant systématiquement la voûte ce qui permettait un contrôle de l’état du « plafond » des chambres d’exploitation. En même temps, les déchets d’abattage  étaient laissés dans la mine pour remonter le niveau du sol et conserver ainsi une hauteur de travail sous voûte constante d’environ 10 m.
Le fonçage du puits N°2 de la Pouëze utilisera cette dernière méthode, le puits  étant équipée d’une « quarrée » c’est-à-dire un chevalement qui pouvait extraire des blocs de schiste de 3 à 6 tonnes. Il descendait jusqu’à 200 m mais il s’effondra en 1922. Un nouveau puits N°3 fut foré à 210 m et recreusé en 1970 jusqu’à 455 m de profondeur. En 1990, l’effondrement en chaîne des chambres d’extraction condamne définitivement l’exploitation de l’ardoise à La Pouëze.

La reconstruction du chevalement.

Dans ce paysage de buttes et de vieux fonds, s’élevaient encore deux chevalements l’un métallique aujourd’hui démonté et l’autre en bois construit en 1922 au-dessus du puits N°3 de « L’Espérance », seul ouvrage de ce type encore debout en France. Le bois fut longtemps le matériau le plus utilisé pour la construction des chevalements en raison du développement  du commerce des grumes et par sa facilité de mise en d’œuvre. A partir de 1890, les houillères mais aussi les autres sites miniers abandonnent le bois au profit du fer sauf pour les chevalements provisoires installés pour le fonçage des puits. Dans les ardoisières, on observe une période transitoire qui donne naissance entre 1890 et 1925 à des quarrées traditionnelles en bois qui adoptent la morphologie des nouveaux chevalements métalliques. Cette adaptation est liée à la mécanisation du système d’extraction de la  pierre  grâce à la machine à vapeur mais celle-ci augmente  fortement la traction des câbles, les ingénieurs sont donc  contraints  de contrebuter la structure élémentaire de l’ouvrage  par des jambes de force obliques, les « poussards ».

Plan du chevalement du puits N°3, 1923 (communiqué par Cl. Mignot, ancien charpentier aux A.D.A. à La Pouêze)

Le chevalement de La Pouëze est l’archétype de cette évolution structurelle ce qui explique son inscription à l’inventaire supplémentaire des monuments historiques en 1999. Malheureusement alors que les études étaient en cours pour sa restauration, le chevalement s’écroulait le 25 février 2011. Dès lors une  reconstruction du chevalement s’imposait.

Vers une renaissance touristique du site.

Le silence de la sirène qui rythmait depuis deux cents ans la vie des « perreyeux » et des habitants de la commune nous appelle désormais à ne pas oublier les ouvriers d’à-bas et d’à-haut qui ont extrait et fabriqué une si belle ardoise qu’elle couvrait la plupart des grands édifices publics, des  demeures et châteaux du Val de Loire mais aussi de Paris et de l’Ile-de-France.

Photo du levage de la partie haute du chevalement

Montage du chevalement en deux temps.
Phase 1 : montage sur place du 1er niveau
Phase 2 : levage de la structure fabriquée en atelier.

La reconstruction du chevalement du puits N°3 fait la fierté des acteurs publics, associations, bénévoles et des nombreux donateurs qui ont répondu à la souscription lancée par la Fondation du Patrimoine. Ils se sont tous mobilisés autour d’un projet qui nourrit « L’Espérance », en ce lieu si bien nommé, de perpétuer la mémoire ouvrière et le souvenir du passé ardoisier de l’Anjou.

Hugues Poulain,  conseiller technique auprès de la Fondation du Patrimoine

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Réalisation - Nicolas-b

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